Point sur les réformes du Crous et des Bourses

Publié le par nanterre mobilisée

LES REFORMES SOCIALES : LAMBERT (CROUS) ET PECRESSE (BOURSES)

                        ► Objet de cette synthèse : faire le point sur les différentes réformes qui concerneront toutes les mesures d’aides sociales des étudiants. Synthèse réalisée à l’aide, principalement, des textes ministériels, des éléments à disposition sur le site du CNOUS (dispositifs, simulateurs, textes de lois, …), des analyses syndicales (UNEF, FSE, UNI, SNESup, SNASUB, SUD) et du rapport Lambert (Un réseau d’agences pour la vie étudiante, 70 p. ; désormais abrégé, RL, suivi du n° de page). C’est une synthèse personnelle : les interprétations du rapport Lambert n’engagent que son auteur ; ces interprétations s’imposent dès lors qu’on voit toutes les convergences terminologiques et d’orientations de ces mesures sociales avec les textes de la LRU, du projet de contrat doctoral unique, du décret sur les statuts des enseignants-chercheurs, des réformes des statuts des Biatoss (voir synthèse à ce sujet, à la suite de ce document).

                        ► Rappel : le mouvement actuel insiste beaucoup sur les conditions désastreuses qu’auront les différentes réformes sur le plan social, principalement pour les étudiants :

                        – avec la LRU : risque très problable d’augmentation des frais d’inscription ;

                        – avec la mastérisation : allongement des études sans accompagnement financier (bourses à 108, voire 220 € par mois ; « gratifications » et non salaires pour les stages), d’où sélection sociale ; précarisation des futurs enseignants recrutés sur listes d’aptitude ; perte de l’année de stage et d’une annuité pour la retraite ;

                        –          avec la réforme du statut des Biatoss : précarité croissante (CDD), salaires à part indemnitaire dépendant de résultats évalués dans un entretien individuel ;

                        –          avec le projet de contrat doctoral unique : précarisation des étudiants-docteurs (licenciement sans préavis, période d’essai de 2 mois, etc.).

 

                        Mais la question de la réforme des CROUS n’a pas été (sauf erreur) particulièrement été mise en avant dans le mouvement (l’UNEF ne réagit plus à la question depuis décembre 2008 ; les organisations syndicales étudiantes n’en parlent plus guère, si ce n’est de la suppression de certains critères pour le calcul des bourses ; le SNASUB a étudié les conséquences pour les personnels Biatoss). Lorsqu’on s’attaque à ce dossier, on est écœuré. Disons-le d’entrée : c’est un concentré de toutes les réformes, une toile tissée qui concerne tous les acteurs de la communauté universitaire et qui pourrait s’intituler : « comment se débarrasser, enfin, de tous les pauvres au profit des plus riches ? ».

                        Le dispositif actuel : une spécificité française, pour plus d’égalité sociale

 

                        ► Structure globale :

                        1 CNOUS (Centre National des Œuvres Universitaires et Scolaires) et 28 CROUS (Centres Régionaux des Œuvres Universitaires et Scolaires) ;

                        établissements en charge de l’accueil social et matériel des étudiants ;

                        dispositif mis en place fin années cinquante et quasi-unique (exception = modèle allemand +/-proche) ;

                        dispositif complexe et sans pouvoir : les CROUS sont de « simples prestataires, sans assise juridique, pour le compte des recteurs (ordonnateurs) compétents en matière d’attribution de bourses d’enseignement supérieur ; les trésoreries générales assurent le paiement » [RL : 26].

                        ► Grands secteurs d’intervention :

                        aides financières (bourses) ● logement étudiant

                        restauration universitaire ● action sanitaire et sociale

                        accueil international ● action culturelle

                        ► Chiffres :

                        budget : 2 milliards d’euros pour 2 300 000 étudiants ;

                        boursiers : 500 000 ;

                        proportion moyenne de boursiers / académie : 25% (avec fortes disparités : Paris 12%, Lyon 18%, Besançon 28%, Lille 30%, Antilles 38%…). Disparité de situations importante, à prendre en considération, car elle s’accroîtra avec les réformes à venir.

 

II. La réforme : un système anglo-saxon, pour plus d’inégalité sociale chez les étudiants

► On se focalisera sur certains points : les §§ 5-6 pourraient être développés : ils vont dans le même sens que ce qui est dit dans les §§ 1-4 [pour 5-6, donc, se reporter à RL : 37-41]

1. Aides financières

1.1. Les mesures Pécresse pour les bourses

► Les bourses sur critères sociaux ne font pas l’objet de développement dans RL. C’est Mme Pécresse qui s’en est occupée elle-même, dès son arrivée au ministère en 2007 (réforme devant être appliquée en sept. 2008, mais reportée à sept. 2009, après le recours des CROUS à la rentrée 2008 qui a obtenu le maintien des conditions d’attribution de 2007) :

                        ●          le système d’attribution des bourses sur critères sociaux est complexe : 6 échelons de bourse (+ un niveau 0), avec calcul points de charge (jusqu’à 17). On n’entrera pas dans le détail, pour ne retenir que les modifications introduites par V. Pécresse dans le calcul :

                        – suppression de 2 critères (éloignement du domicile = 66% des boursiers ; situation monoparentale = 17%) ⇒ sont donc visées les catégories d’étudiants les plus fragiles (habitant loin des centre-villes, ou dans des familles frappées par le divorce, la mort d’un parent, etc.) ;

                        –          affaiblissement d’un critère, compté pour 1 point de charge et non plus 2 (handicap = 2000 étudiants) ⇒ même remarque que précédemment.

                        ⇒ cette suppression entraînera la perte d’un échelon pour 16 000 ét. (= perte de 450-1390 €/an) et la perte de deux échelons pour 4 000 ét. (= 900-2000 €/an) ; cela se traduira en particulier par la suppression de bourse pour 2 000 ét. !

                        pour compenser ces pertes pour 20 000 étudiants (qui seront encore plus démunis alors qu’ils ont réellement besoin d’une bourse), relèvement du plafond revenus parentaux à plusieurs dizaines de milliers d’euros = 50 000 nouveaux boursiers, pris parmi les plus riches (« victoire » de l’UNEF ) ⇒ on déshabille les plus pauvres pour habiller les plus riches.

 

• Tout ça au moment où les frais inscription vont s’accroître et où 92 députés UMP songent à rendre l’université fortement payante (frais d’inscription de plusieurs milliers d’euros) pour soi-disant rendre l’université moins inégalitaire (http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/propositions/pion1391.pdf) ! Se rappeler qu’une bourse d’échelon 6, le plus élevé, ne correspond qu’à 4019 € / an (334 € / mois). On comparera avec les 15 milliards pour les 14 000 familles protégées par le bouclier fiscal = 15 milliards, c’est 375 000 bourses de l’échelon 6. L’argent pour aider les étudiants les plus pauvres existe, il ne leur est simplement pas destiné. Quelques exemples d’inégalité de traitement dans le nouveau dispositif, qui s’appliquera à la rentrée 2009 ; base de calcul : étudiant sans salaire, appartenant à une famille avec un autre enfant en situation de scolarité :

                        – les parents gagnent 32 000 € par an (le calcul se fait sur le revenu imposable ! La somme précédente correspond à un revenu de près de 35 000 € nets par an !) et habitent en centre ville ⇒ pas de bourse (quand même !), mais échelon 0 avec prise en charge frais inscription et sécurité sociale !!

                        – les parents gagnent 25 000 € / an et habitent en centre ville ⇒ bourse de 1424 € / an ;

                        – les parents gagnent 15 000 € / an (ne sont donc pas imposables) et habitent en centre ville ⇒ bourse de 3847 €/ an ;

                        – les parents gagnent 5 000 € / an (ne sont donc pas imposables) et habitent à plus de 250 km de l’université ⇒ bourse de 4019 € / an (170 € de plus que le cas précédent par an, ce qui couvre difficilement de multiples aller-retour en train, et, évidemment, encore plus en voiture…).

                        – N.B. : si l’étudiant travaille à côté, pour compenser la maigreur de sa bourse, ce critère diminue ipso facto sa bourse. Seule solution, fréquemment utilisée : ne pas déclarer son travail complémentaire pour conserver une bourse la plus élevée possible ⇒ ce qui favorise les petits boulots, le travail au noir étant souvent / toujours synonyme d’exploitation. L’étudiant doit donc assumer une bourse ridicule, un travail au noir (il doit se cacher du fisc)… et des études, aussi.

 

1.2. Le rapport Lambert et le suivi des boursiers

► Lambert propose un croisement des fichiers CROUS (application AGLAE qui recense les ét. boursiers) et de ceux de la scolarité des universités (application APOGEE), dans le but d’une simplification et d’un « meilleur suivi » [RL : 27-28], pour voir combien le dispositif boursier profite aux étudiants.

• On y verra plutôt un véritable « flicage » des étudiants, dont les conséquences seront dommageables, une fois de plus, pour les plus démunis[1]. Je fais part ici de mon expérience de responsable des lettres, en L1L2 : nombreux sont les boursiers qui, vu la maigreur des bourses, travaillent à côté pour compléter… et voudraient bien avoir une dispense d’assiduité pour pouvoir faire ce travail – mais les boursiers n’ont pas le droit à une dispense d’assiduité. C’est donc le cercle infernal : le boursier n’a pas d’argent, il obtient une bourse insuffisante, complète et sèche des cours sans DA, est donc non assidu… et se verra supprimer sa bourse – à terme, il ne pourra plus faire d’études.

2. Logement étudiant

                        ► Le rapport Lambert préconise en général :

                        le transfert des APL (210 € / mois environ pour un étudiant boursier louant un T1 à 400€ / mois) et ALS (150 € / mois max.) des Caisses d’Allocations Familiales vers les Agences pour la Vie Etudiante (AVE : voir infra, § III.1). • Risque de cette décentralisation = les aides dépendraient alors des moyens des AVE, dans leurs partenariats avec le privé ⇒ si pas de fonds (surtout en contexte de crise), quelles seront les aides ?

                        la remise en valeur du parc immobilier des CROUS et le développement de l’offre publique, au cas par cas, « en temps réel » [RL : 29]. • Offre publique = l’essentiel sur quoi mettre l’accent [se rappeler que 155 000 logements CROUS et 60000 logements proposés par bailleurs privés ⇒ manque de 285000 logements pour les plus démunis (sans parler du 1,5M d’autres étudiants)]. Or, aucun chiffrage budgetaire n’est envisagé, tout reste à discrétion des AVE locales, en fonction de leurs moyens ou des préconisations du Conseil d’Orientations Stratégiques – voir infra § III. 1 ;

                        l’aide à la recherche de logements par des conseils juridiques, la mise en place de chartes… (cautère sur une jambe de bois !).

                        ► Les mesures libérales :

                        « développe[ment de] l’offre privée par des stratégies partenariales avec », entre autres, les « acteurs privés » [= BTP, banques, bailleurs privés ; RL : 29]. Ex. : labellisation des logements du parc privé comme logements à destination des étudiants. • Pb des logements privés = tarifs location généralement supérieurs…

                        développement des prêts locatifs ⇒ favorise l’endettement des étudiants (cf. taux d’emprunt dans les banques) – voire, le surendettement, quand s’ajoutent les emprunts pour les frais d’inscription (voir le système anglo-saxon : étudiants américains surendettés entre 40 000 et 150 000 $ à la fin de leur études) ;

                        « formules innovantes » [RL : 31] : cohabitation, logement intergénérationnel [principe = logement d’un étudiant en échange de son assistance auprès de personnes âgées ou malades]. • Comment s’occuper de personnes âgées et/ou malades… et suivre simultanément ses études ? De plus, mécanisme retors de suppression d’emplois médicaux spécialisés (garde-malades, infirmières, accompagnements…).

 

3. Restauration universitaire

► Rapport Lambert vise obtention normes (certification ISO), distribution nourriture Bio, diversification des repas… Comment cela sera-t-il fait ?

• Envers du décor :

                        « reconquête de la clientèle » [RL : 33], vocabulaire marketing privé clair…

                        « généralisation de la monétique » [RL : 34] = permet partenariat avec banque (comme avec la carte CUMUL à Lyon 2) ⇒ tendance à capter « clientèle » 2,3 M de pers. & à la rendre captive…

                        « politique dynamique des ressources humaines : emplois qualifiés, formation des personnels, organisation du travail, mutualisation de fonctions supports » [RL : 34] ⇒ on retrouve le pb des BIATOSS (suppression de postes par mutualisation, postes à responsabilités particulières (PRP), donc avec compétences particulières, évaluations, primes, etc.) = précarisation des personnels.

 

4. Action sanitaire et sociale

                        ►        Constat RL en 10 lignes [RL : 34-35] : dégradation des conditions de santé des étudiants (plus de maladies, souvent graves, pas de médicalisation, faute de moyens) ; souligne l’importance des assistants sociaux (175, soit 1 pour 12500 ét. !)[2]. Après ce constat assez dramatique, quel remède ? Lambert enchaîne curieusement[3] avec la création d’un « guichet social unique de proximité », relevant des décisions du Conseil d’Orientations Stratégiques (COS, voir infra, § III. 1), pour « développer la promotion de la santé des étudiants » [RL : 35-36] = l’arnaque majeure du dispositif, calquée sur le modèle américain, en vigueur sur les campus.

                        ► « Guichet social unique de proximité » [RL : 36] =

                        (i) introduction  du privé ds les AVE, qui deviennent des sortes de galeries marchandes avec des « dispositifs de services mutualisés (espaces de services) en partenariat avec les acteurs universitaires, publics, privés, associatifs : recherche de logements, relais local des partenaires publics (CAF, LOCAPASS..), privés (bailleurs privés, entreprises..), services semi-marchands (reprographie, Internet très haut débit, librairie, banque… » [RL : 36]. • « Avantage » = économise les frais de locaux au privé, payés par le public[4] ;

                        (ii) emplois précaires des étudiants chez ces « partenaires privés » (banques, entreprises…) ou dans les services d’intérêt général. But = « développer l’implication d’étudiants dans les organisations de travail des agences. Pour faire face à des besoins ponctuels, limités ou saisonniers, il est légitime de recourir à des étudiants dans le cadre d’emplois temporaires. Les emplois concernés sont profitables à l’étudiant dans un large spectre d’activités : fonctions d’animation, de monitorat, de tutorat, participation à des activités d’accueil, ou à d’autres activités au sein des restaurants et des résidences universitaires »[RL : 36]. Les étudiants se retrouveraient ainsi tout le temps entre eux : étudiants vendeurs dans une libraire, guichetiers dans les banques, serveurs dans les restos U, etc. • « Avantages » = 1. fournit une main d’œuvre précaire, très adaptée, à la différence des personnels traditionnels qui posent le pb d’une rémunération des personnels pendant tous les congés universitaires ; 2. permet la suppression des Biatoss de catégorie C souhaitée par VP (cf. le risque reconnu dans l’élaboration des nouveaux restaurants du plan Campus à Lyon) ;

 

(iii) gain d’argent pour les étudiants qui leur permettrait ensuite de se payer une mutuelle [le rapport ne le dit pas, mais c’est la seule façon d’expliquer que ce développement se trouve à cet endroit, suite à la question « comment améliorer la santé des étudiants ? »] ;

(iv) gain       de « formation » qui permet l’acquisition de crédits et une validation partielle dans les diplômes = « reconnaissance de l’engagement de ces étudiants vis-à-vis de leurs pairs dans leur cursus universitaire (crédits ECTS) » [RL : 36] • « Avantages » = permet l’économie de cours universitaires, donc de personnels enseignants-chercheurs ; accroît la valeur des diplômes (un étudiant pourra avoir une licence dans laquelle p.ex. 1/10e ou 1/6e consisterait à avoir vendu des frites au restaurant universitaire)…

CONCLUSION : Tout le monde est perdant. Pour l’étudiant : santé, formation et petit boulot de merde.

5. Accueil international et mobilité étudiante

6. Action culturelle (on passe… C’est tout pareil !)

CONCLUSION GENERALE

► Face à toutes ces évolutions qui conduisent à des missions caractéristiques du secteur privé, le rapporteur Lambert précise qu’il ne souhaite pas une évolution vers des organismes privés mais leur conservation comme organismes publics.

•    Explication : un établissement public, selon les principes de la loi d’orientation relative à la loi de finances (LOLF), permet des dérogations, type partenariats public-privé (PPP) : c’est toujours le principe de socialisation des coûts et de privatisation des profits (cf. le montage du plan Campus à Lyon).

III. Les grands principes de la réforme : une énième LRU

1. La structure (CA, présidents, contrôles financiers)

                        ►        Le rapport Lambert (septembre 2008) retouche l’intégralité du dispositif. Principes essentiels = simplification des instances pour faciliter toutes les démarches pour les étudiants, qui se feront uniquement dans les AVE ; prise en considération du statut des personnels ; souci du service public. Mais derrière ces paravents rassurants se cachent des enjeux libéraux type LRU qu’on peut résumer en 3 mots :

                        ► Autonomie =

                        désengagement de l’Etat : le CNOUS devient l’ANVE (Agence Nationale de la Vie Etudiante) aux prérogatives très réduites, dont le président est celui de la CPU… ou un VP de la CPU ;

                        renforcement des instances locales : les CROUS deviennent des AVE (Agences de la Vie Etudiante), très indépendantes, sur budgets propres et variables / académies, avec personnels propres (non fonctionnaires). Actuellement, les CROUS sont sous la responsabilité du ministère, du rectorat et du CNOUS ⇒ désormais, les AVE seront sous la direction d’un seul directeur d’agence, hyper-puissant ;

                        subordination des CROUS aux universités : étonnamment, le rapporteur Lambert introduit une nouvelle instance, le Conseil d’Orientations Stratégiques (COS), surtout piloté par l’université, qui définit missions des AVE et rapproche les ex-CROUS de l’université ; leur président est celui du PRES.

                        • le « petit monde » de l’hyperprésidentialisation :

                        – parmi les personnes consultées par Lambert, directeur du CROUS de Lyon, se trouvent plusieurs présidents d’université (ce qui ne va pas de soi, les CROUS étant indépendants, actuellement, des universités), dont deux promoteurs de la LRU [RL : 67-68] = M. Lussault (président de l’université de Tours, devenu président du PRES lyonnais…) et L. Collet (président de l’université Lyon1, devenu président de la CPU) ⇒ les consultants n’auront pas été consultés inutilement ;

                        – le CA de l’ANVE perd 2 membres, mais gagne 2 VP de la Conférences des Présidents d’Université (CPU) [RL : 46] ;

                        – le CA de l’AVE gagne un VP étudiant, celui du CA de l’université = caution de plus de démocratie, d’implication des étudiants, de « légitimité renforcée » [RL : 46 ; 48-49]. Mais ce VP est élu par le CA de l’université et peut ne pas refléter la tendance majoritaire étudiante mais la tendance majoritaire des EC au CA[5]. Conclusion : ce sont surtout les pouvoirs du président et une orientation unique qui sont renforcées (sachant que le mode de scrutin de la LRU entraîne déjà une sur-représentation de la liste majoritaire parmi les EC) ;

                        – le COS, véritable instance décisionnaire, ne comprend plus que 20% d’élus étudiants (va à rebours de la prétention d’accroître la représentation étudiante, 33% ds ANVE et AVE) [RL : 47]…

                        un « petit monde » clos sur soi :

–   confinement du contrôle financier [RL : 61] : actuellement, le contrôle se fait en amont (avant utilisation des sommes) et est doublé (contrôleur financier en région + CNOUS) ; à l’avenir, il sera « simplifié » = unique, local et en aval, pour donner plus de pouvoir décisionnaire au directeur AVE ⇒ risque = pouvoir absolu + circularité ;

–   confinement du contrôle légal [RL : 62] : actuellement, il est assuré par Division des Affaires Financières ; à l’avenir, pour simplifier, il sera fait par le préfet… lequel nomme les 4 représentants de l’Etat dans les AVE ⇒ circularité, à nouveau.

CONCLUSION : comme pour la LRU, l’autonomie débouche sur un fonctionnement plus autoritaire et moins démocratique.

                        ► Privatisation = transformation des CROUS en agences de moyens aux ressources tirées pour beaucoup du privé ⇒ qu’arrivera-t-il dans le cas des académies où il y a un très fort taux de boursiers (Lille, Antilles) ?

                        ► Précarisation = des étudiants, des personnels (voir ci-dessous, § III. 2).

 

2. Les personnels : toujours plus de précarité

► Actuellement, CNOUS et CROUS emploient 3000 fonctionnaires et 9 000 contractuels. Le but, plusieurs fois affirmé, serait de passer à une « e-administration » [RL : 56] et d’aller vers un « management stratégique et [une] gestion qualitative », mais tout en favorisant la réduction des CDD en CDI [RL : 60], l’accompagnement social et indemnitaire : le rapporteur Lambert fait toujours miroiter le positif du service public.

• En clair =

                        (i) mutualisation et        redéploiement des personnels = suppression postes, externalisation, précarisation (CDD, p.ex. offerts aux étudiants) ;

                        (ii) démolition du statut de fonctionnaire : « évoluer d’une gestion des personnels reposant sur les notions de corps et de grades de la fonction publique vers une gestion des métiers permettant une gestion prévisionnelle des compétences » [RL : 59] – voir dossier suivant sur les statuts des BIATOSS, § XX ;

 

(iii) individualisation des postes et carrières (postes à responsabilité particulière), avec évaluation et primes aux résultats, comme le résument deux citations :

                        – « politiques de recrutement mieux ciblées et une gestion des emplois assise sur la notion de métiers. Cela appelle, comme pour les universités, une autonomie renforcée des agences dans la gestion des différents dispositifs d’emplois » [RL : 58] ;

                        –          « développer les procédures de recrutement sur des postes à profil (procédure des postes à responsabilité particulière) » [RL : 59].

 

Ph. Selosse, Lyon2, Snesup / PAU (Pour une Autre Université)



[1] Rappelons que la mise en place d’un appel, dans les TD de licence, ne va pas de soi : dans le secondaire, les « élèves » ne sont pas majeurs ; dans l’université, les « étudiants » sont adultes, majeurs, payent leurs droits d’inscription et ne devraient pas avoir à justifier de leur présence. Le « bon sens » qui veut qu’un étudiant boursier soit assidu n’est de bon sens que si la bourse permet effectivement à l’étudiant d’être dégagé de tout souci matériel (de survie) – ce qui n’est pas le cas.

[2] De nombreux rapports sanitaires, associations et journaux ont souligné l’impossibilité pour les étudiants de supporter les frais médicaux et que leur non médicalisation conduit à la résurgence de maladies (tuberculose) et d’une forte détérioration de la santé des étudiants.

[3] Le même type d’argumentation en apparence illogique a été utilisé lors du débat sur les partenariats public-privé, qui avait lieu le 9 mars 2009 au forum Biovision de Lyon (et auquel V. Pécresse, annoncée, n’a pas pris part – mais durant lequel trois étudiants manifestant pacifiquement furent arrêtés : solidarités et informations en écrivant à cosibio@riseup.net). La modératrice anglaise, représentant le marketing d’une firme pharmaceutique, a ouvert les débats par l’interrogation suivante (je cite de mémoire – c’était en anglais) : « un enfant meurt toutes les 3 secondes dans le monde. Le temps que je prononce cette phrase, 18 enfants sont morts. Pourquoi tant d’enfants meurent-ils ? Est-ce un manque de médicaments ? Est-ce la pauvreté ? Est-ce la faim ? Est-ce le manque d’éducation ? Non, l’explication réside dans le manque de développement des partenariats public-privé et c’est ce qui rend le débat de ce soir très excitant ». Même logique : présentation catastrophique appuyée par un gros pathos, stupeur de l’auditoire auquel, dans la foulée, on présente une solution toute faite : le libéralisme salvateur ; grosse manipulation consistant à passer de la misère sanitaire de personnes à la nécessité du recours au privé. En l’occurrence, si le public se rapproche du monde pharmaceutique (représentants de Sanofi et Mérieux participaient au débat), la recherche médicale progressera et les enfants ne mourront plus. L’avantage de faire un saut logique, c’est qu’on abandonne toute logique.

[4] Selon le principe de socialisation des pertes observé actuellement pour les banques : l’Etat vient à leur secours temporairement, sa participation cessant dès le redressement financier des établissements bancaires.

 

[5] Ainsi dans une université lyonnaise, le VP étudiant du CA est issu de la liste qui a un siège (25%) et non de celle, opposée à la majorité présidentielle, qui en a deux (33%) !

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